mercredi 14 août 2013

Une retraite philosophique en pleine nature en compagnie de Frère Georges et d'Anthémios ! (2/2)

Nous retrouvons Anthémios et son maître, Georges, pour la suite de leur retraite philosophique au milieu de la nature que nous avions commencé le mois dernier dans le post précédent. Il y est encore question de quête de la sagesse, mais Georges revient surtout aux fondamentaux en tentant de définir d'abord ce qu'est la sagesse, en s'appuyant en particulier sur Platon et la pensée socratique. C'est un nouvel instant de révélation pour le jeune postulant... 


Dans cette partie du huitième chapitre, Georges laisse Anthémios réfléchir et méditer sur ce qu'il vient de lui dire, puis il finit par lui poser une question plus abrupte : selon lui, qu'est-ce que la sagesse ?
Héraclite, peinture de Johannes Moreelse, vers 1630,
Centraal Museum d'Utrecht  (Wikimedia Commons)
Platon, Sénèque et Aristote, enluminure du XIVème siècle
tirée d'un manuscrit regroupant différents textes philosophiques,
vers 1325-1335, Devotional and Philosophical Writings London
(Wikimedia Commons)

Anthémios est confus, car il comprend bien la difficulté de la question, mais n'ayant pas de réponse satisfaisante à fournir il reste muet et gêné. Georges éclate alors de rire et le charrie un peu avant d'évoquer avec lui les conceptions de la sagesse, souvent fort différentes, qu'ont eu de grands philosophes : Héraclite, Aristote ou Sénèque. 

Mais c'est sur Socrate qu'il préfère insister, car sa méthode lui paraît la plus probante. Georges se base plus particulièrement sur un dialogue socratique de Platon : Le Charmide. Anthémios découvre ainsi la démarche dialectique de Socrate : la maïeutique, l'accouchement de l'âme.
Portrait de Socrate,
marbre romain du Ier siècle,
Musée du Louvre
(Wikimedia Commons - Eric Gaba)
Fac similé d'une page du Codex Oxoniensis Clarkianus 39,
manuscrit daté de 895 et présentant le début
du dialogue du Charmide (Wikimedia Commons - Sijthoff)




Le dialogue du Charmide tourne autour de la définition de la sagesse et met en scène Socrate, Charmide, un jeune homme censé représenter l'idéal de la personne humaine dans la pensée philosophique grecque traditionnelle (l'homme "kalos kaï agathos", littéralement "beau et bon") et enfin l'oncle de ce dernier : Critias. Dans ce dialogue, Socrate cherche à démonter et contrer les vertus supposées de Charmide, tandis que Critias cherche, lui, à les défendre. 

Par un habile jeu de questions, Socrate parvient aisément à placer son interlocuteur dans une auto-contradiction. Ce dernier en vient à se remettre en cause dans ces certitudes, à le disposer dans une plus grande modestie intellectuelle. Il va devoir se poser des questions sur lui-même, sur ce qu'il sait vraiment... bref, se connaître lui même...

Georges aborde ainsi le fameux précepte du "Connais-toi, toi-même" (le Gnothi Seauton), que l'on peut lire sur le fronton du temple de Delphes, dans le sanctuaire d'Apollon.
Temple d'Apollon à Delphes, sanctuaire des oracles (Wikimedia Commons - Frank Fleschner)

L'objet de ce dialogue, plus que de définir la sagesse, est donc de pousser à faire cet examen de soi pour se mettre dans les meilleures dispositions intellectuelles pour apprendre. C'est d'ailleurs ainsi que Georges clôture son allégorie en précisant à Anthémios que l'essentiel n'est pas de remplir entièrement son canthare, mais de faire la démarche nécessaire pour y parvenir en adoptant cette honnêteté intellectuelle. 
Abside de l'église Saint Jean du monastère du Stoudios,
bâtie vers 462, l'un des plus anciens vestiges d'église
encore visible à Istanbul (Wikimedia Commons - Imrahor)

Anthémios comprend très bien le message. Mais curieux comme toujours il demande à son maître comment il a connu le dialogue du Charmide, et celui-ci lui répond qu'il l'a étudié parmi d'autres textes profanes lorsqu'il se trouvait dans d'autres monastères, en particulier au Stoudios, le monastère le plus important de Constantinople (dont il reste quelques ruines visibles à Istanbul, voir photo ci-contre), ainsi que dans celui qu'il connut auparavant dans sa région sur les pentes du Mont Olympe de Bithynie.
Le Mont Uludag (Wikimedia Commons - Tone)

Une montagne aujourd'hui connue sous le nom d'Uludag ("montagne haute" en turc), 2 543 m, dans le nord-ouest de l'actuelle Turquie, et dont le surnom turc reste "la montagne des moines", tant la présence de monastères et d'ermites était importante à l'époque byzantine. De nos jours, cette montagne a perdu quelque peu de son aura mystique et elle est désormais plutôt célèbre pour le tourisme, puisque qu'elle est un spot important pour le trekking et le camping l'été et que se trouve sur ses pentes l'une des principales station de ski turque... 


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