mercredi 8 avril 2015




Les Dardanelles au cinéma : une affaire turco-australienne !


Une fois n'est pas coutume, le blog parle de cinéma ! A l'occasion de la sortie du film "La Promesse d'une Vie", le 15 avril prochain, premier long métrage de Russel Crowe en tant que réalisateur, je vous propose un post qui revient sur les principales fictions ou documentaires cinématographiques ayant trait à la bataille des Dardanelles. Un tour d'horizon logiquement dominé par les productions australiennes et turques...
   


Les films sur le thème de l'expédition de Gallipoli sont relativement nombreux mais ils sont le plus souvent le fait de réalisateurs turcs ou australiens, et beaucoup plus rarement de leurs homologues britanniques ou français. Ce constat est assez logique car en France ou au Royaume-Uni , les Dardanelles ne sont qu'un épisode parmi d'autres dans la longue litanie de batailles qui se sont succédé durant la Grande Guerre. Un épisode qui s'est d'ailleurs soldé par un échec... Bref, rien de très vendeur pour une production cinématographique dans ces pays... 

En revanche, en Turquie, en Australie ou en Nouvelle Zélande, cette bataille a véritablement la dimension d'un mythe fondateur. Côté turc, elle est un symbole de fierté nationale, celle d'avoir résisté à une coalition internationale et de l'avoir mise en échec, alors qu'il s'agissait de la plus grande opération amphibie jamais réalisée jusque là. Pour les Australiens et les Néo-Zélandais, cette participation à cette bataille est un événement qui marque l'entrée de ces deux pays dans le concert des nations. C'était la première fois que les armées de ces pays, encore simples dominions de l'Empire Britannique, participaient à un conflit international. Le 25 avril, jour du débarquement aux Dardanelles, est d'ailleurs férié dans ces deux pays. Il est désigné sous le nom d'Anzac Day et est aussi populaire là-bas que le 14 juillet chez nous.

Il est donc naturel que ce soit dans ces pays que les principaux films sur le sujet aient été produits. Voici un panorama des films notables tournés ces dernières décennies, en commençant par le plus récent, celui de Russel Crowe qui fait l'actualité en ce mois d'avril.

L'affiche française du film (Universal Pictures France)


La Promesse d'une Vie (The Water Diviner), de Russel Crowe, 2014 : Sans surprise, ce premier long métrage a fait un carton à sa sortie, pendant les fêtes, en Australie. Il ne pouvait en être autrement : Crowe est un dieu vivant dans sa mère patrie et le thème de Gallipoli y est mythique. Reste à voir l'accueil qu'il va recevoir en Europe. Il sortira le 15 avril en France et en Belgique. Les quelques critiques que j'en ai lu pour le moment sont plutôt encourageantes pour un premier film et c'est Russel Crowe lui-même qui porte le film à bout de bras. Il est la seule vraie star du casting et c'est d'ailleurs sur son nom que cette production américano-australienne a pu être montée et financée. A défaut, il est probable que le film n'aurait jamais vu le jour.
Russel Crowe durant le tournage (Wikimedia Commons - Basil Fox)










Cette histoire a pour particularité de se situer après guerre et non pas pendant les combats, bien que certains flash-backs au cours du récit nous y entraînent. 
L'action se situe en effet en 1919 et le personnage principal, Joshua Connor, interprété par Russel Crowe donc, est un paysan australien qui part en Turquie à la recherche des dépouilles de ses trois fils tués quatre ans plus tôt aux Dardanelles. Il en avait fait la promesse à sa défunte épouse. Ce rural, un peu rustre, est avant tout sourcier (d'où le titre de la version originale The Water Diviner) dans la vie et son périple en Turquie est assez tumultueux : déboussolé par les aspects déroutants de Constantinople et confronté aux autorités militaires britanniques qui font obstacle à ses démarches. Il va finalement bénéficier de l'aide d'une hôtelière nommée Ayshe et interprétée par la belle Olga Kurylenko, ainsi que par un officier turc sensible à son entreprise... 
Je suis curieux de découvrir ce premier film qui a déjà le mérite de traiter d'un aspect méconnu de cette bataille : celui de la recherche et de l'identification de dépouilles sur la péninsule après la guerre.
Plus que quelques jours à attendre, le film sortira dans les salles mercredi prochain. Pour patienter, voici un lien vers la bande d'annonce de ce film prometteur, comme le sous entend son titre... https://www.youtube.com/watch?v=23kgkr6vD-8
        
L'affiche turque originale (TT Film)

Gallipoli, la bataille des Dardanelles (Canakkale Yolun Sonu), de Kemal Uzun, 2013 : Ce film turc a été l'un des grands succès au box-office 2013 dans ce pays. Doté d'un budget conséquent pour une production turque, ce film a grand spectacle comporte des scènes de guerre assez convaincantes et raconte le parcours de deux frères turcs qui se retrouvent à combattre aux Dardanelles. L'un des enjeux du film est de suivre la destinée de ces deux frères, il est question aussi d'un duel à distance entre deux tireurs d'élite australien et turc, ainsi que d'une histoire d'amour (très chaste) entre ce dernier et une infirmière ottomane. Critiqué pour quelques détails matériels non respectés ou quelques effets spéciaux peu subtils, ainsi que pour son côté un peu trop nationaliste, ce film reste de bonne qualité et la vraisemblance de le reconstitution historique est plutôt concluante. Cette fiction a par ailleurs le mérite d'offrir un point de vue turc sur cette bataille. Je vous propose d'en découvrir la bande annonce sous le lien suivant : http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19545466&cfilm=215744.html



L'affiche utilisée en France
lors de la sortie du documentaire (Ekip Films)

Gallipoli, la bataille des Dardanelles (Gelibolu), de Tolga Ornek, 2005 : Seul documentaire de cette sélection, ce film turc porte en français le même nom que le précédent... mais contrairement à celui-ci, il a été diffusé dans les salles en France, l'année de sa sortie, il y a maintenant 10 ans et dans un relatif anonymat. Il est pourtant de très bonne qualité, même si on peut lui reprocher de s'intéresser essentiellement aux opérations turques ou à celles de l'ANZAC durant la bataille et moins à celles des Britanniques ou des Français qui ont pourtant été majeures. La version anglaise a pour particularité d'être notamment racontée par Jeremy Irons... Pour visionner la bande annonce de ce documentaire intéressant et en savoir plus sur celui-ci, utilisez le lien suivant: http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=18403808&cfilm=107985.html

L'affiche originale du film
(Wikimedia Commons - The Australian Film Commissio
n)
Gallipoli, de Peter Weir, 1981 : Nous terminons par un classique, celui qui reste le film référent sur le thème des Dardanelles. Tourné il y a déjà trente-quatre ans, par un Peter Weir alors en début de carrière, "Gallipoli" n'a pas pris un trop fort coup de vieux et se regarde encore avec plaisir (il vient d'ailleurs de passer ce soir sur Arte, alors que j'écrivais ces lignes...). Weir n'avait pas encore connu les grands succès qui marqueront son parcours les années suivantes comme "Witness", "Le Cercle des Poètes Disparus", "Green Card" ou "The Truman Show" notamment mais il fait déjà preuve d'une belle maîtrise dans ce drame historique même si ce n'est certainement pas son meilleur film. Son "Gallipoli" retrace le parcours de deux amis australiens, Frank Dunne et Archie Hamilton, athlètes prometteurs, qui en viennent à s'engager en mai 1915 pour aller combattre lors de la Grande Guerre. Ils se retrouvent à Gallipoli et y découvrent les horreurs de la guerre... Les scènes sur le front n'occupent à peine que la deuxième moitié du film, même si ce sont les plus marquantes, en particulier la scène finale véritablement déchirante devenue quasi-mythique (d'ailleurs évoquée sur l'affiche du film ci-dessus). L'essentiel du film se concentre sur l'avant-guerre et l'amitié, ainsi que la vie sportive, des deux personnages principaux, puis leur période de mobilisation et d'instruction, notamment en Egypte. En cela, ce film n'est pas sans faire penser à un mélange, à la sauce australienne, de deux films sortis à peu près à la même époque : Voyage au Bout de l'Enfer (1978) et Les Chariots de Feu (1981). 
La réussite du film tient dans l'entente des deux acteurs principaux, Mark Lee, dans le rôle de Hamilton, censé être alors la star du film et dont on n'a plus vraiment entendu parlé depuis... et par un jeune débutant nommé Mel Gibson, dans le rôle de Dunne, et qui a fait, pour sa part, une toute autre carrière...
Mark Lee et Mel Gibson lors d'une scène nocturne du film (Wikimedia Commons - The Australian Film Commission)
C'est véritablement Mel Gibson qui porte ce film, il avait alors déjà été vu dans Mad Max (1979) mais c'est bien avec ce premier rôle majeur qu'il sera révélé au grand public. Ce film, dont le scénario est basée sur une histoire de Peter Weir lui-même, a connu un beau succès et a été primé l'année de sa sortie par la plus haute distinction du cinéma australien. On notera que la musique originale du film est signée Brian May, le guitariste de Queen, et que les musiques additionnelles sont le fruit d'un certain Jean-Michel Jarre. Des morceaux de compositeurs classiques, comme Albinoni, viennent également compléter la bande son.

Pour vous remettre dans l'ambiance de ce film très "Années 80", et revoir Mel Gibson avec trente quatre années en moins, je vous propose un lien vers la bande annonce de l'époque: 
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19487646&cfilm=30736.html           


Voilà pour les films les plus notables. Il y en a d'autres que l'on aurait pu évoquer, mais il y a aussi des projets qui auraient pu voir le jour et qui sont restés dans les tiroirs, comme celui de Peter Jackson, le fameux réalisateur néo-zélandais des trilogies du "Seigneur des Anneaux" et du "Hobbit". Jackson avait pour projet à la fin des années 2000 d'adapter un remake du "Gallipoli" de Peter Weir mais avec des personnages néo-zélandais. A l'instar de Russel Crowe, il imaginait le sortir pour 2015 en prévision du centenaire de la bataille qui sera commémoré à la fin de ce mois. Il faut dire que son grand-père a combattu aux Dardanelles et que cette expédition fait donc partie de l'histoire familiale chez les Jackson. Finalement, pas convaincu par l'intérêt de réaliser un simple remake à la sauce néo-zélandaise, le cinéaste semble avoir mis ce projet de côté. 

Alors, Peter, si tu nous lis et que tu cherches une histoire originale à adapter sur le thème des Dardanelles, pense à "La Découverte de Gallipoli" ! Même adapté avec des soldats ou des personnages néo-zélandais, plutôt que français, ça fonctionnera ! J'attends ton message...

A bientôt.

Olivier.